Après son livre consacré à la notion d’interface, c’est à une interface particulière que Gérard Chazal s’intéresse: les théories scientifiques étudiées comme intermédiaires entre nous et le monde, à travers lesquelles se construisent les savoirs qui nous permettent une emprise toujours plus puissante sur les choses.
Les philosophes ont parfois rejeté les conceptions du sens commun du côté de l’illusion, les théories scientifiques ayant alors pour fonction de les dissiper afin de nous conduire à la réalité cachée derrière les phénomènes. Parfois encore ils ont jugé toute tentative d’atteindre une quelconque réalité en soi comme vaine. Il n’y a alors de réalité que dans la théorie. La connaissance se replie sur elle-même, guettée aussi bien par le relativisme que par l’idéalisme. Enfin, les plus idéalistes n’ont vu dans l’ordre des choses qu’une projection de notre esprit et de ses propres structures.
On s’accordera cependant pour reconnaître que les théories scientifiques s’intercalent entre le monde et nous, et participent de la construction du savoir. Ce détachement de la connaissance par rapport à la perception immédiate entraîne une profonde dérive des concepts, la disparition de certains, la naissance de nouveaux.
C’est cette vie des interfaces théoriques que Gérard Chazal nous propose d’explorer à travers quatre grands domaines historiquement délimités: la géométrie, la physique, le calcul et les sciences de la vie et de la terre.
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Les médiations théoriques
Le sommaire
INTRODUCTION 9
GéOMÉTRIE
I. Prémices 9
1. Rationalisation des images oniriques 1
2. Quadriller – les arpenteurs égyptiens 12
3. Voyages et conquêtes: de Colomb à Mercator 15
4. Pour conclure sur ces prémisses 20
II. Géométrie ou Algèbre 24
1. La question de l’espace 24
2. Les victoires de l’analyse – le monde mathématisé 27
3. Réticences et résistances 30
III. Retour à l’espace 44
1. Riemann, la notion de variétés
et les fonctions de variables complexes 45
2. R. Thom: de l’étude des singularités des fonctions
différentiables et du cobordisme à la théorie des catastrophes 48
3. La représentation des systèmes dynamiques 52
4. La géométrie fractale 54
IV. Conclusion 57
PHYSIQUE 61
I. Sauver les phénomÈnes 62
1. La «révolution scientifique du xviie siècle 64
2. La construction des théories: le cas de l’électricité et de la thermodynamique 78
II. Théories et réalité 87
1. De l’énigme de la mesure à la question du réel 88
2. La question du réel 104
3. Les remaniements de l’interface 118
III. Conclusion:
La volonté d’universel et le pouvoir mathématique 128
CALCUL 132
I. De Leibniz et du calcul
comme métaphysique à la logique comme calcul 133
1. Logique extensionnelle et représentation graphique 138
2. Les circuits logiques ou la logique matérialisée 144
II. Buffon et le calcul du hasard 150
1. Le paradoxe de Saint Petersbourg 153
2. Le jeu de franc-carreau 155
3. En quoi l’arithmétique peut-elle être morale? 158
III. Les signes du calcul 159
IV. La maÎtrise du monde, calcul et technique 166
1. Techniques premières et calcul des proportions 168
2. La théorie réduite à la formule efficace 176
V. Les limites théoriques du calcul 179
1. Les limites internes des formalismes opératoires 180
2. Les limites externes du calcul en prise sur le monde 184
VI. Conclusion 187
SCIENCES DE LA VIE, SCIENCES DE LA TERRE 189
I. La notion de Nature: le ventre mou des théories 190
iI. De la classe à la forme 195
1. L’intelligence du cristal: R. J. Haüy 199
2. L’opérateur topologique, de Geoffroy Saint-Hilaire
à D’Arcy Thompson 205
III. La conquÊte de la dimension temporelle 212
1. Le temps géologique 212
2. Le temps de l’évolution 215
IV. La fonction expérimentale: l’exemple de la génération 221
V. Les tentatives de mathématisation 225
1. Les théories statistiques de l’hérédité 226
2. Singularités et bifurcations 230
3. Le modèle non métrique de l’approche topologique
de René Thom 234
VI. Détour par l’artifice 239
VII. Conclusion 248
CONCLUSION 251
BIBLIOGRAPHIE 257